Fonctions exécutives

Fonctions exécutives

Fonctions exécutives

Texte théorique / 2-5 ans, 5-12 ans / Apprentissage scolaire, Fonctions exécutives, Inhibition, Flexibilité cognitive, Mémoire de travail, Planification, Métacognition, Développement cognitif

Le texte qui suit vise à expliquer ce que sont les fonctions exécutives. Il ne se veut pas exhaustif, car il porte sur les seuls aspects illustrés par les vidéos sur ce site. Pour un portrait complet de la question, nous vous suggérons de consulter les documents en référence. La première partie du texte définit les fonctions exécutives et leur rôle dans le développement de l’enfant, et la seconde présente certaines d’entre elles plus en détail.

Les fonctions exécutives (FE) sont un ensemble de fonctions cognitives dites supérieures. Elles permettent l’adaptation à une situation changeante en contrôlant le comportement, les pensées et les émotions. Ainsi, l’enfant peut poser des actions intentionnelles et réfléchies afin d’atteindre son objectif, qu’il s’agisse, par exemple, de résoudre un conflit interpersonnel ou encore un problème mathématique complexe (Benson et Sabbagh, 2013; CTREQ, 2018; Gagné, Leblanc et Rousseau, 2009; Guay, 2019; Hammarrenger, 2017). Il demeure difficile de déterminer les fonctions cognitives considérées comme faisant partie des FE, car les chercheurs n’arrivent pas à établir un consensus à ce sujet. À titre d’exemple, plusieurs chercheurs ne considèrent pas que l’attention ou les fonctions attentionnelles en font partie. Selon Lachaux (2014), les fonctions attentionnelles permettent de filtrer les informations. Ces informations sont par la suite traitées par les FE afin qu’il y ait adaptation. Cependant, cette relation est bidirectionnelle. En effet, des déficits dans certaines FE, comme l’inhibition ou la mémoire de travail, font en sorte que les fonctions attentionnelles sont moins performantes (Willcutt, Doyle, Nigg, Faraone et Pennington, 2005).

L’inhibition, la mémoire de travail et la flexibilité mentale (CTREQ, 2018; Duval, Bouchard et Pagé, 2017) sont des fonctions cognitives qui sont fréquemment citées comme étant des FE dans les différentes sources. Certains y ajoutent aussi la planification et la régulation des émotions (Gagné, Leblanc et Rousseau, 2009; Hammarrenger, 2017). Dans les vidéos sur ce site, l’inhibition, la mémoire de travail, la flexibilité mentale et la planification ont été retenues et sont explicitées plus loin dans le texte.

Reposant principalement sur les lobes frontaux, les FE ne se développent pas toutes au même rythme. Actives dès la petite enfance, elles apparaissent et se complexifient en fonction de la maturation du lobe frontal et des stimulations (expériences) proposées à l’enfant, et ce, jusqu’au début de l’âge adulte (Duval, Bouchard et Pagé, 2017; Gagné, Leblanc et Rousseau, 2009; Hammarrenger, 2017). 

Aussi, il est possible de classer les FE en deux catégories : froides et chaudes (Hammarrenger, 2017; Rueda et Paz-Alonzo, 2013; Volckaert, 2020). Les FE froides désignent les compétences utilisées pour résoudre ou analyser une situation dans un contexte non émotif. Par exemple, lorsqu’un élève doit résoudre un problème de mathématique ou encore lorsqu’il doit contrôler les interférences en inhibant une réponse automatique comme dans le paradigme de Stroop ou Test Jour-Nuit [mettre url ici lorsque disponible], il utilise des FE froides. À l’opposé, lors de la résolution de conflits ou encore lorsqu’il faut reporter une action qui entraîne une récompense, comme ce qui est illustré dans la vidéo portant sur le Test de la guimauve [mettre url ici lorsque disponible], ce sont les FE chaudes qui sont sollicitées. Ces dernières entrent en jeu lorsque des aspects émotionnels ou motivationnels sont impliqués dans la situation à laquelle l’enfant doit s’adapter (Hammarrenger, 2017; Rueda et Paz-Alonzo, 2013; Volckaert, 2020). Selon Volckaert (2020), les FE froides seraient davantage liées aux apprentissages scolaires (littératie et numératie), alors que les FE chaudes prédiraient les comportements, dont les comportements sociaux. Dans les vidéos présentées dans ce site, les différences entre les FE froides et les FE chaudes sont illustrées principalement par des tâches d’inhibition qui sont décrites plus loin.

Selon Morgan, Farkas, Wang, Hillemier, Oh et Maczuga (2019), les FE sont liées à la santé mentale et physique des enfants ainsi qu’à leur réussite scolaire. En effet, ces auteurs soulignent que des déficits (ou lacunes) pour certaines FE durant la petite enfance sont corrélés avec des difficultés scolaires au primaire, plus particulièrement la mémoire de travail et l’inhibition, qui sont abordées ci-dessous. À titre d’exemple, l’enfant présentant un déficit de mémoire de travail a de la difficulté à gérer plusieurs consignes ou encore à comprendre un texte. En ce qui concerne l’inhibition, l’enfant n’arrive pas à ignorer des informations non pertinentes dans une tâche scolaire, ou encore à contrôler des comportements impulsifs qui pourraient déranger ses apprentissages (p. ex., parler à son voisin) (Morgan, Farkas, Wang, Hillemier, Oh et Maczuga, 2019).

Inhibition

L’inhibition est la capacité à supprimer intentionnellement une réponse non pertinente ou une réponse dominante ou automatique (CTREQ, 2018; Hammarrenger, 2017). Elle permet à l’enfant de résister aux distractions de son entourage ou de contrôler ses comportements, ses pensées et ses émotions (CTREQ 2018; Duval, Bouchard et Pagé, 2017; Gagné, Leblanc et Rousseau, 2009; Hammarrenger, 2017).

L’inhibition serait la première FE à se développer, car toutes les autres s’appuient sur elle (Gagné, Leblanc et Rousseau, 2009; Hammarrenger, 2017). C’est d’ailleurs entre les âges de 3 et 5 ans qu’il est possible d’observer une progression rapide de cette FE (CTERQ, 2018; Gagné, Leblanc et Rousseau, 2009; Hammarrenger, 2017). Au départ, l’inhibition est externe, et les limites sont mises en place par les adultes qui entourent l’enfant (Gagné, Leblanc et Rousseau, 2009). Puis, progressivement, l’enfant intériorise et automatise ces contrôles, libérant ainsi ses ressources cognitives pour d’autres tâches, dont la mémoire de travail et les apprentissages (Gagné, Leblanc et Rousseau, 2009; Hammarrenger, 2017). Dans un premier temps, l’enfant apprend à inhiber ses comportements, puis s’ajoutent les pensées et les émotions. À titre d’exemple, un enfant âgé de 3 à 5 ans est en mesure d’attendre son tour pour se laver les mains ou de se retenir de faire un geste (p. ex., le jeu Jean dit ou le Test de la guimauve).

Entre 5 et 8 ans, l’inhibition se complexifie et se nuance. Ainsi, vers 7 ans, l’enfant peut interrompre une action qu’il a amorcée, réfléchir avant de poser une action et résister de plus en plus aux distractions (CTREQ, 2018; Gagné, Leblanc et Rousseau, 2009). Cette résistance aux distractions l’aide, entre autres, à résoudre des problèmes de mathématiques en lui permettant d’ignorer les informations non essentielles (Cragg et Gilmore, 2014). À compter de 9 ans, l’enfant est en mesure de s’auto-observer pour ajuster ses comportements inhibiteurs (Gagné, Leblanc et Rousseau, 2009). Par exemple, le jeune pourrait se rendre compte qu’il n’est plus concentré sur sa tâche, car il y a eu un bruit dans sa classe, et après cette prise de conscience, se remettre au travail.

Mémoire de travail

La mémoire de travail est un système cognitif dynamique, qui traite et manipule une petite quantité d’information pour une courte période (CTREQ, 2018; Gagné, Leblanc et Rousseau, 2009; Hammarrenger, 2017). C’est grâce à cette FE que l’enfant est en mesure d’exécuter une tâche en manipulant mentalement ces informations (Blair, 2013; Guay, 2019; Hammarrenger, 2017). Par exemple, lorsque l’enfant doit réciter à rebours une série de chiffres ou faire un calcul mental, c’est sa mémoire de travail qui est sollicitée, car en plus de garder les informations actives dans sa mémoire à court terme, il doit les manipuler mentalement pour arriver à donner une réponse ou à résoudre un problème sans sauter d’étapes.

La capacité de la mémoire de travail, deuxième FE qui entre en jeu dans le développement de l’enfant, évolue en fonction de la maturation du lobe frontal (CTREQ, 2018; Gagné, Leblanc et Rousseau, 2009; Hammarrenger, 2017). Ainsi, avec la mémoire de travail verbale, un enfant de 5 ans serait en mesure de traiter environ quatre éléments tandis que vers 12 ans, ce nombre passe à sept (Gagné, Leblanc et Rousseau, 2009). Tout comme la quantité d’information, le temps où celle-ci demeure dans la mémoire de travail progresse aussi entre la période préscolaire et scolaire (CTREQ, 2018; Gagné, Leblanc et Rousseau, 2009; Hammarrenger, 2017). C’est ce qui permet à l’enfant, entre 5 et 7 ans, de suivre plusieurs consignes ou étapes pour réaliser une tâche par exemple (Gagné, Leblanc et Rousseau, 2009; Hammarrenger, 2017).

La mémoire de travail soutient les apprentissages scolaires. Sur le plan de la lecture, elle permet de mémoriser les informations pertinentes d’un texte afin d’être ensuite en mesure de relier plusieurs éléments entre eux et ainsi, d’arriver à faire des liens implicites et à dégager des concepts plus abstraits. Sur le plan des mathématiques, elle permet de recourir à des opérations mentales plutôt que d’utiliser des outils concrets, et dans les épreuves de résolution de problème, elle permet de garder mentalement active la stratégie de résolution et de planification des actions, sans oublier d’étapes ni perdre d’information nécessaire en cours de route. (Gagné, Leblanc et Rousseau, 2009; Guay, 2019).

Flexibilité mentale

La flexibilité mentale ou cognitive consiste en la capacité de passer d’une situation à une autre ou de passer d’une façon de penser à une autre de façon fluide et rapide afin de s’adapter à des changements imprévisibles (Duval, Bouchard et Pagé, 2017; Gagné, Leblanc et Rousseau, 2009; Guay, 2019). Ce faisant, l’enfant peut tenir compte de plus d’un facteur pour une situation donnée ou changer sa perception ou sa stratégie de réponse si une nouvelle information est disponible (Blair, 2013; Gagné, Leblanc et Rousseau, 2009; Hammarrenger, 2017). La flexibilité permet aussi à l’enfant de tolérer les modifications qui peuvent survenir à tout moment (Gagné, Leblanc et Rousseau, 2009).

Au préscolaire, les enfants font preuve de flexibilité dans diverses situations, comme le jeu symbolique, ou pour tolérer des modifications aux consignes (CTREQ, 2018; Duval, Bouchard et Pagé, 2017). À l’âge scolaire, cette FE soutient les stratégies utilisées par l’enfant pour résoudre un problème ou pour s’ajuster lorsqu’il rencontre des échecs (Gagné, Leblanc et Rousseau, 2009 ; Hammarrenger, 2017).

Planification

Pour être en mesure de planifier, l’enfant a besoin de l’inhibition et de la mémoire de travail (Hammarrenger, 2017). La planification vise l’atteinte d’un but en prévoyant les étapes d’exécution ainsi que les stratégies pour l’atteindre, notamment la gestion de son temps (Gagné, Leblanc et Rousseau, 2009; Hammarrenger, 2017). Cette FE nécessite une autorégulation cognitive, aussi nommée « planification dans l’action », afin de vérifier pendant la réalisation de la tâche si les stratégies mises en place permettent d’atteindre l’objectif fixé (Gagné, Leblanc et Rousseau, 2009).

Observable dès la période préscolaire, la planification continue de se développer à l’âge scolaire jusqu’à environ 25 ans (Hammarrenger, 2017). À titre d’exemple, lorsque l’élève résout un problème mathématique avec plusieurs étapes, il doit prévoir des moments pour vérifier s’il tient compte de tous les éléments fournis et si les stratégies ou les outils choisis sont pertinents et permettent de trouver la solution. C’est aussi durant cette période que l’élève devient de plus en plus apte à anticiper et à distribuer le temps pour réaliser ses tâches (Gagné, Leblanc et Rousseau, 2009). Ainsi, il peut estimer le temps pour réaliser ses devoirs ou encore se faire un plan de travail pour répondre aux questions d’une évaluation (Guay, 2019).

Références

Benson, J. et Sabbagh, M.A. (2013). Le lien entre les fonctions exécutives et la cognition sociale. Dans Encyclopédie sur le développement des jeunes enfants. http://www.enfant-encyclopedie.com/fonctions-executives/selon-experts/le...

Blair, C. (2013). Les fonctions exécutives à l’école. Dans Encyclopédie sur le développement des jeunes enfants. http://www.enfant-encyclopedie.com/fonctions-executives/selon-experts/le...

CTREQ (2018). Projet Savoir. Troisième dossier. Continuum du développement des fonctions exécutives de la petite enfance à l’âge adulte.  http://www.ctreq.qc.ca/wp-content/uploads/2018/10/Fonctions_executives_1...

Cragg, L. et Gilmore, C. (2014). Skills underlying mathematics: The role of executive function in the development of mathematics proficiency. Trends in Neuroscience and Education, 3(2), 63-68.

Duval, S., Bouchard, C. et Pagé, P. (2017), « Le développement des fonctions exécutives chez les enfants », Les dossiers des sciences de l’éducation [En ligne] http://journals.openedition.org/dse/1948. doi : 10.4000/dse.1948

Gagné, P. P., Leblanc, N. et Rousseau, A. (2009). Apprendre… une question de stratégies : Développer les habiletés liées aux fonctions exécutives. Montréal : Chenelière éducation.

Guay, M.C. (2019). Ces enfants qui apprennent autrement. Montréal : Les Éditions du Trécarré.

Hammarrenger, B. (2017). Le TDAH chez l’enfant et l’adolescent. Québec, Québec : Éditions du Midi-Trente.

Lachaux, J.P. (2014). Le cerveau attentif : la dynamique de l’attention. [En ligne] https://www.cortex-mag.net/cerveau-attentif-dynamique-lattention/

Morgan, P. L., Farkas, G., Wang, Y., Hillemeier, M.M., Oh, Y. et Mazuca, S. (2019). Executive function deficits in kindergarten predict academic difficulties across elementary school. Early Childhood Research Quarterly, 46(1), 20-32.

Rueda, R.M. et Paz-Alonzo, P.M. (2013). Les fonctions exécutives et le développement affectif. Dans Encyclopédie sur le développement des jeunes enfants. http://www.enfant-encyclopedie.com/fonctions-executives/selon-experts/le...

Volckaert, A. (2020) Qu’entend-on par fonctions exécutives chaudes et froides ? Approche neurologique des apprentissages chez l’enfant. [En ligne] https://www.youtube.com/watch?v=cYr5G0ZhXn8

Willcutt, E. G., Doyle, A. E., Nigg, J.T., Faraone, S.V. et Pennington, B.F. (2005). Validity of the Executive Function Theory of Attention Deficit/Hyperactivity Disorder: A Meta-Analytic Review, Biological Psychiatry, 57(11), 1336-1346.

Auteur(s): 

Nathalie Fréchette et Paul Morissette

Ayant(s) droit: 

CCDMD

Date de parution ou dernière mise à jour: 

2021-02-18

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